Le législateur a consacré une définition assez précise de la transaction civile en la qualifiant de contrat par lequel les parties mettent un terme par voie amiable, à un litige ou en préviennent la survenance[1].
Ainsi, la question de sa nature juridique est légalement tranchée, contrairement à celle de la transaction pénale.
Une étude juridique rigoureuse s’impose pour pouvoir conclure, à la fin, que la transaction pénale est un contrat (I) principalement administratif (Section II).
Le principe est bien connu : l’action publique appartient à le société et l’autorité chargée de l’exercer ne peut en disposer. On parle de l’indisponibilité de l’action publique (ou du procès pénal). Il y a portant des cas exceptionnels où cette action peut s’éteindre par l’effet des volontés particulières. Il en est ainsi de l’accord exécuté entre l’autorité publique et l’auteur des faits.
Ce caractère exceptionnel de la transaction pénale ne donne que plus d’intérêt à l’étude de sa nature.
Il convient d’étudier le caractère judiciaire de la proposition de transaction pénale (A), avant de préciser le caractère contractuel de sa conclusion (B).
Il convient de distinguer entre la proposition de transaction faite par le ministère public (1) et la proposition de transaction administrative (2).
La proposition de transaction faite par le ministère public a fait l’objet d’une jurisprudence du juge administratif qui met bien en évidence son caractère judiciaire. Ainsi, le juge administratif refuse de connaître du recours contre une offre de transaction émanant du ministère public considérant que cette offre n’est pas détachable de la procédure judiciaire, car elle se rattache à une procédure répressive dont le litige relèverait d’une procédure judicaire[2].
Cette solution est bel et bien établie et elle se retrouve renforcée par la jurisprudence selon laquelle la décision prise par le ministère public est elle-même non susceptible de recours devant une juridiction administrative[3].
Donc, l’offre de transaction est considérée par le juge administratif comme un acte de procédure judiciaire non susceptible de recours.
En revanche, le juge administratif est compétent pour apprécier les conséquences pécuniaires dommageables d’un refus de poursuite de la part du ministère public[4].
La Cour de cassation considère, pour sa part, que l’offre de transaction pénale, bien qu’émanant du ministère public, n’est pas un acte juridictionnel assimilable à un acte d’instruction ou de poursuite. En effet, elle a estimé que « les actes accomplis à l’occasion d’une procédure administrative pouvant aboutir à une transaction, soit à des poursuites judiciaires » ne sont pas susceptibles d’interrompre la prescription[5].
Cette position de la Cour suprême était logique si on prenait en compte l’absence de toute organisation des droits de la défense à ce stade de la proposition de transaction, considéré comme antérieur à l’action effective de la justice contre l’intéressé, et ce, avant que la loi du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits, n’entre en vigueur.
Le caractère de l’offre de transaction proposée par le ministère public doit être distinguée de celui de la proposition de transaction administrative.
L’offre de transaction qui émane de la personne publique constitue, en principe, un acte administratif unilatéral susceptible d’être contesté en tant que tel devant le juge de l’excès de pouvoir[6]. Ainsi, par exemple, dans l’ancienne législation sur le contrôle des
prix, l’offre de transaction constitue une décision sur le principe de la sanction applicable au particulier qui peut la contester sur ce point[7].
Si l’offre de transaction n’est pas acceptée dans le délai prescrit, elle devient caduque[8], et tant qu’elle n’a pas été acceptée, elle peut être retirée par l’administration qui l’a proposée[9].
Cette offre relève normalement de la transaction administrative classique et doit bien évidemment être distinguée de la proposition de transaction pénale, faite par une administration légalement habilitée pour ce faire. Cette offre est considérée par le juge administratif comme étant un acte de procédure judiciaire non susceptible de recours.[10]
Toutefois, l’étude de la nature de la proposition de transaction administrative devient particulièrement intéressante lorsque l’objet de l’offre est une sanction.
Le caractère administratif, et non pénal, de la sanction emporte alors la qualification de la transaction dont la proposition devient attaquable devant le juge administratif[11].
Pour une administration autorisée à pratiquer les deux formes de transaction comme l’administration des douanes, la recevabilité d’un éventuel recours devant le juge administratif dépendra donc de la nature administrative ou judiciaire de la sanction encourue par le contrevenant à qui s’adresse l’offre de transaction contestée.
A la primauté du caractère judiciaire de la proposition de transaction répond donc la primauté du caractère contractuel de la conclusion de la transaction.
En dépit de toutes les difficultés à l’admission du caractère contractuel de la conclusion de transaction (1), celui-ci s’impose (2).
Contrairement à la transaction administrative qui se fait sur le fondement de l’article 2044 du Code civil aux termes duquel « La transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître. » Comme l’a montré le Conseil d’Etat, sa nature s’impose donc par définition.
L’affirmation est moins évidente pour la transaction pénale et des arguments ont pu être avancés à contrario. En effet, le caractère sanctionnateur et pénal de la transaction a été relevé pour la qualifier de peine qui sanctionne un délit, compte pour la récidive, et éteint l’action publique en vertu du principe non bis in idem.
En outre, si le consentement de l’intéressé est nécessaire pour conclure un tel acte, la discussion semble absente d’une procédure qui se limite à l’acceptation ou non de termes fixes émanant de l’administration. En effet, le déséquilibre entre les forces des parties contractantes ne fait pas de doute[12].
De plus, la recevabilité de certains recours pour excès de pouvoir contre l’offre d’une administration habilitée à transiger a pu susciter des doutes quant au caractère contractuel réel de la transaction[13].
Pourtant, en dépit de ces arguments, le caractère contractuel de la transaction pénale semble bien réel.
2) L’effectivité du caractère contractuel de la conclusion de transaction
La transaction pénale est un contrat, cette affirmation est bel et bien effective et elle est soutenue par des arguments solides.
Tout d’abord, la transaction pénale ne génère pas une peine. Son principe va à l’encontre de tout objectif d’intimidation et elle n’a aucun caractère afflictif ou infamant[14].
La transaction n’est pas non plus l’œuvre de la procédure pénale, mais d’une procédure administrative. Elle se substitue à la peine sanctionnant l’infraction en cause et ne représente en aucun cas cette première. D’ailleurs, le fait qu’elle peut se cumuler avec les poursuites pénales et les peines en est la preuve. L’exemple de l’injonction thérapeutique (même si elle n’est pas spécifiquement relative à une infraction d’affaire), est bien significatif à cet égard, car elle n’est exclusive de poursuites que pour la première infraction[15], et peut, dans tous les autres cas, se cumuler avec l’exercice des poursuites pénales. Un tel cumul serait impossible si la transaction était une peine en vertu du principe non bis in idem[16]. Enfin, la transaction pénale est librement acceptée ; or, le droit français ne prévoit pas de peines librement acceptées[17].
En outre, deux auteurs peuvent être à l’œuvre d’une transaction pénale. Le ministère public, ou l’administration en son nom, n’est compétent que pour formuler la proposition et non pour mettre seul en place la transaction qui doit être acceptée par le délinquant. Si cette dualité d’auteurs n’est pas un caractère suffisant pour arrêter la nature contractuelle de l’acte, elle reste une condition nécessaire[18].
La forme de l’acte confirme cette idée, puisque en dépit d’une rédaction spécifique, inhérente à son objet, la transaction donne lieu à un écrit signé par les parties dans lequel celles-ci consignent leurs engagements respectifs.
Ce type d’accord formalisé et signé se retrouve notamment dans la procédure britannique de l’accord de médiation. En effet, le Crown Prosecution Service (CPS) (le parquet en France), peut, pendant une procédure intermédiaire, dite « pre-trial review », discuter avec le défenseur de l’affaire pour déterminer les chefs d’accusation qui seront retenus devant le tribunal. En fait, ils négocient souvent la question de l’opportunité des poursuites[19]. Cet accord obéit aux mêmes conditions de formes que la transaction française.
Enfin, l’intéressé ne participe pas, normalement, à l’élaboration de cet acte. En effet, il ne peut que l’accepter ou le refuser. Cette situation est fréquente pour une partie privée contractant avec l’administration, et ces critères sont ceux du contrat d’adhésion qui les unit.
Le contrat d’adhésion est un contrat[20], même si les conditions de la transaction pénale (conséquence d’une infraction imputable à l’intéressé), justifient que le particulier cocontractant ne bénéficie pas de la protection accordée par le législateur et la jurisprudence dans le Droit commun du contrat d’adhésion.
Donc même si le terme « contrat » n’apparaît jamais formellement et les mesures concernées ne correspondent à une catégorie contractuelle usuelle, le contenu matériel de ces actes, en tant qu’échange de volontés, doit conduire à les assimiler à des contrats innomés. Le Conseil d’Etat en apporte d’ailleurs la preuve quand il conclue à l’absence d’effet déterminant de dénomination de l’acte à qualifier[21] (la transaction).
Le particulier a en effet, un engagement qui est celui de l’exécution des actes exigés par la transaction en échange, les poursuites doivent être abandonnées.
Il y a bien échange de volontés en dépit du déséquilibre apparent dans les rapports entre les parties à la transaction. Ces dernières ne sont d’ailleurs liées qu’après la signature de l’acte puisque le ministère public semble pouvoir à tout moment retirer une proposition de transaction s’il estime que l’intérêt public l’exige, sans que l’intéressé puisse s’en prévaloir.
La transaction pénale est donc bien un acte « destiné à régir les rapports de ceux dont les volontés se sont rencontrées »[22], générateur d’obligations réciproques. Elle est un contrat dont la qualification dépendra largement des modalités de chaque forme de transaction pénale.
La transaction est un contrat dont la qualification n’est pas si évidente, même si ses propres caractères sont plutôt en faveur de son assimilation principalement à un contrat administratif.
La qualification administratif de la conclusion de transaction s’impose par son régime d’un côté (A), et par son objet de l’autre côté (B).
La transaction pénale peut être un contrat administratif parce qu’une personne publique (le ministère public ou administration autorisée à transiger) est partie à ce contrat : « Celle-ci est une partie ordinaire, liée comme son cocontractant privé par la convention résultant de l’accord des volontés »[23].
Mais un contrat conclu entre une personne publique et personne privée ne relève effectivement de ce régime que s’il apparaît comme ou un acte de gestion publique en raison de ses clauses, de son objet ou de son régime.
Les clauses exorbitantes de droit commun de la plupart des transactions pénales et leur régime légal permettent d’affirmer le caractère administratif de ces contrats et d’identifier une exception en la matière.
Certaines formes de transactions pénales présentent des clauses exorbitantes, de droit commun et un régime légal qui attestent de leur nature de contrat administratif.
Une part significative des clauses de la transaction pénale figurent manifestement parmi
« Celles qui ne pourraient pas être insérées dans un contrat entre particuliers… et celles ayant pour effet de conférer aux parties des droits ou de mettre à leur charge des obligations, étrangers par leur nature à ceux qui susceptibles d’être librement consentis par quiconque dans le cadre des lois civiles et commerciales »[24].
La victime d’une infraction peut, d’une façon licite, ne pas limiter sa négociation avec les parties concernées, au seul déclenchement de l’action publique, mais en plus l’étendre à son droit de s’abstenir de se constituer partie civile et donc monnayer son renoncement à déclencher obligatoirement l’action publique.
D’une façon plus générale, toutes les prérogatives de puissance publique qui confèrent à l’administration des moyens de contrainte sont manifestement exorbitantes au regard des compétences de droit commun et sont, à l’évidence, exclues dans les relations privées. En matière d’infractions douanières ou de change par exemple, l’administration des douanes peut proposer une transaction prévoyant la contrainte pour paiement.
De même, l’administration fiscale peut, par voie contractuelle, saisir et confisquer certains matériels, véhicules…
L’exemple de la composition pénale est significatif à cet égard. En effet, celle-ci prévoit que le ministère public peut proposer une amende de composition au profit du Trésor public ou un dessaisissement au profit de l’Etat.
De son côté, le ministère public est autorisé à vérifier la bonne exécution du contrat afin de préserver son droit d’exercice des poursuites en cas de défaillance du contractant.
Le Conseil d’Etat a déjà décidé qu’une seule clause exorbitante suffise à qualifier un contrat d’un contrat administratif[25].
Toutefois, le régime légal des transactions pénales peut jouer un rôle principal dans leur qualification. En effet, chacune des formes de transaction pénale est organisée par la loi, en tant que dérogation au principe général d’indisponibilité de l’action publique. Les textes législatifs déterminent les prérogatives de puissance publique prévues dans la procédure et toutes les spécificités du contrat dérogatoires au droit commun.
Dès lors, il paraît clair que le régime de ces contrats ne découle pas de leur qualification, mais s’impose dès que leur exercice est prévu par la loi. Toutefois, le régime légal de ces contrats impose de les qualifier aussi de contrat administratif puisque le parquet doit autoriser cette procédure et peut la rejeter, voire l’accepter à la condition suspensive que la somme à payer soit plus importante.
Dès lors, le dispositif déroge manifestement aux règles de Droit privé, et sort donc, de par son régime légal, du champ de cette branche de Droit.
Ensuite, il convient de préciser que l’administration est liée dès la signature de la transaction, et une mise en œuvre des poursuites pendant ou après la transaction, en l’absence de réitération, ne semble pas, à priori, possible. En matière fiscale ou douanière, la transaction produit même un effet obligatoire similaire à un jugement de condamnation.
L’administration reste, néanmoins, libre de choisir son cocontractant qui ne peut exiger la conclusion du contrat après proposition de l’administration.
En plus, le régime légal de ces transactions empêche l’applicabilité des autres caractéristiques classiques du régime du contrat administratif. En effet, le pouvoir de résiliation unilatérale dans l’intérêt du service dont dispose l’administration ne saurait être évoqué. Cette solution paraît logique dans la mesure où, d’un côté, le déclenchement de ce pouvoir impliquerait l’engagement des poursuites, dans l’intérêt général et de l’autre, les transactions pénales ne peuvent intervenir, en principe, que pour des infractions de faible gravité, qui ne menacent pas des plus gravement l’ordre public.
Dès lors, la transaction pénale constitue une procédure qui se révèle être principalement un contrat administratif par ses clauses et son régime. Quant à son objet, la transaction pénale est, sur le fond, une sanction administrative librement consentie.
Il convient de préciser, de prime abord, que le critère de l’objet n’est pas indispensable à la qualification de la transaction car les clauses et le régime de ces contrats suffisent à leur attribuer un caractère administratif, celui-ci vient toutefois confirmer une telle nature juridique.
Cet objet se révèle en effet, très spécifique puisqu’il s’agit d’une sanction administrative librement consentie.
En effet, la transaction présente bien un caractère répressif puisqu’elle intervient à la suite d’un acte répréhensible en mettant fin à toute possibilité de poursuites, tout en laissant subsister, même en l’absence de réitération, la possibilité de poursuivre d’éventuels coauteurs ou complices[26].
Elle se traduit le plus souvent, pour l’administré, par le paiement d’une indemnité réparatrice liée à l’infraction constatée.
Toutefois, puisque la répression pénale éventuellement encourue devient impossible, cette sanction ne peut être qu’une sanction administrative.
En outre, les transactions ainsi réalisées peuvent être inscrites dans une forme de mémoire administrative soit pour réclamer une sanction pécuniaire plus sévère en cas de réitération, soit pour être transmises au parquet, à titre d’information, si les poursuites sont engagées. Ainsi, peut-on évoquer le « casier financier et économique » en matière fiscale[27]qui sera utilisé à l’endroit du contrevenant en cas de nouvelle infraction. Ce casier est distinct du casier judiciaire et dispose d’un régime plus sévère que ce dernier. En effet, l’amnistie n’entraîne aucun effacement des transactions pratiquées dans le passé, sauf dispositions contraires en ce sens.
D’ailleurs, le législateur français, a déjà essayé d’instituer un casier judiciaire semblable . En effet, lors de l’élaboration du projet d’injonction pénale, il fut prévu un registre national des injonctions qualifié d’ailleurs de « casier judiciaire bis »[28].
Toutefois, ce projet fut déclaré non conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel le 2 février 1995. On parlait d’une loi avortée[29] à cause de son inconstitutionnalité.
Le Conseil d’Etat a d’ailleurs condamné la pratique du simple avertissement sans trace, et a affirmé la nécessité d’une décision de transaction sans paiement, inscrite au dossier du délinquant, en matière de transaction dans paiement pour infractions économiques[30].
Enfin, si les procédures pratiquées dans le cadre de la transaction pénale n’ont pas été condamnées par le Conseil constitutionnel le 2 février 1995, celui-ci centrant son appréciation sur les dispositions privatives de liberté, elles n’en restent pas moins des sanctions.
Ainsi, si le droit français ne connaît pas de peines consenties[31], il prévoit bien une acceptation de la sanction et donc des sanctions librement acceptées.
D’un autre côté, il convient de remarquer que les cinq principes constitutionnels encadrant l’activité du législateur en matière de sanction administrative s’appliquent pour presque toutes les transactions pénales. C’est le résultat de la protection classiquement reconnue en matière de sanction administrative.
Tout d’abord, Le principe de légalité est affirmé par l’impossibilité de déroger autrement que par une loi spécifique au principe d’indisponibilité de l’action publique prévue à l’article 6, alinéa 3 du Code de procédure pénale.
Ensuite, les principes de nécessité et de proportionnalité sont garantis par l’impossibilité pour l’administration d’imposer une sanction transactionnelle supérieure à celle susceptible d’être infligée par un juge en cas de poursuites.
En plus, le principe de non cumul de la transaction avec une sanction pénale est garanti par les règles légales de mise en œuvre de la transaction qui se caractérise par un renoncement aux poursuites en échange d’une contrepartie, et par l’extinction de l’action publique dès la fin de l’exécution. La Cour de cassation a même jugé que la transaction mettant fin à l’action publique a également pour effet de dessaisir le juge répressif de l’action civile intentée parallèlement à l’action publique[32].
Toutefois cette garantie s’estompe en cas de réitération et ne protège donc le délinquant de manière certaine que pour la première infraction.
En outre, le principe de rétroactivité des lois pénales plus douces est pleinement appliqué. Ainsi, il a été permis aux transactions engagées sous le régime des ordonnances du 30 juin 1945 en matière d’infractions économiques[33] d’aller à leur terme, en dépit de la disparition de la possibilité de transiger en la matière, dans l’ordonnance du 1er décembre 1986[34].
Enfin, les droits de la défense voient leur protection progresser. En effet, intégralement organisés, à l’origine, à ce stade de la procédure, pour l’ensemble des transactions, ils sont désormais régis pour la médiation pénale par la loi du 18 décembre 1998 [35]qui, dans ses articles 13 à 15, étend l’aide juridique à l’intervention de l’avocat en matière de médiation pénale. L’avocat a donc implicitement accès à cette phase transactionnelle puisqu’il peut être rémunéré pour y assurer son client. On ne peut que constater l’absence de l’avocat pour les autres formes de transaction ce qui mériterait sans doute une réflexion du législateur pour harmoniser des régimes dont rien ne parait justifier les divergences. Sont cependant respectées les règles de communication des griefs et d’information préalable qui fondent la logique des transactions, la possibilité de présenter des observations et explications devant le ministère public, la motivation des procédures qui conditionne leur utilisation, ou encore le principe de la présomption d’innocence. Encore faut-il considérer que les droits de la défense sont également assurés par le juge lorsqu’il examine notamment le libre consentement de l’intéressé.
Pour être régulières, ces sanctions, doivent être librement consenties. En effet, la transaction pénale a une nature contractuelle. Par suite, elle est soumise aux règles habituelle de nullité. Dès lors, le consentement du contrevenant ne doit pas être affecté par l’erreur, le dol ou la violence.
La question des conséquences des poursuites pénales sur la transaction s’est déjà posée devant la Cour de cassation. En fait, on a estimé que ces dernières seraient assimilées à la
violence. Par suite, elles constitueraient un motif de nullité. La Cour suprême a répondu par la négative en expliquant que ces poursuites sont la conséquence normale de l’infraction s’il n’y a pas transaction[36].
Par contre, le fait de prévoir une sanction supérieure à celle prévue dans la transaction est bel et bien une manœuvre dolosive[37].
Enfin, l’erreur de fait est aussi susceptible d’entraîner la nullité, à l’exclusion de l’erreur de droit puisque la logique transactionnelle même est de clore une contestation en Droit[38].
De même, la transaction pénale doit être librement consentie pour ne pas mettre en cause les droits individuels conventionnellement et constitutionnellement reconnus.
Ainsi, conformément à l’article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue…par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera… du bien- fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ». Afin de ne pas enfreindre ce principe, un intéressé ne doit pas conclure de transaction « sous une pression si contraignante que l’on saurait s’étonner qu’il y ait cédé».[39]
Le Conseil constitutionnel s’est, quant à lui, référé, dans sa décision du 2 février 1995, à l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen garantissant la présomption d’innocence, au respect des droits de la défense protégé comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République, comme à l’article 66 de la Constitution du 4 octobre 1958 qui fait de l’autorité judiciaire la gardienne de liberté
individuelle, pour déclarer non-conforme à la Constitution les formes nouvelles de transaction susceptibles de priver un individu « d’une procédure juste et équitable garantissant l’équilibre des droits des parties »[40].
Ainsi, il a affirmé que seules constituaient une procédure respectueuse des droits individuels les transactions librement consenties.
La transaction pénale est donc effectivement, par l’ensemble de ces critères et dans la plupart de ses versions, une « sanction administrative librement acceptée ».[41]
Enfin, il convient de conclure que les prérogatives de puissance publique joue un rôle déterminant dans la qualification des différentes formes de transaction pénale.
Cette affirmation trouve facilement sa justification dans la nature du Droit pénal français, qui se rebelle face à la fameuse dualité juridique. En effet, en dépit de son rattachement traditionnelle au Droit privé, il n’en reste pas moins « une branche du Droit public »[42].
Il va sans dire que tous ces influents sur la nature juridique de la transaction relative aux infractions d’affaires vont surgir à divers égards au diapason de son régime juridique.